Supervision, intervision, groupe d’analyse des pratiques,  : quelles différences ?

Supervision individuelle, supervision de groupe, groupe d’intervision, groupe d’analyse des pratiques… : Il existe de nombreux outils de formation professionnelle et de retour sur son travail et son ressenti dans les champs psychologiques, médico-sociaux et médicaux.

Face à ces nombreuses dénominations, on risque vite de se perdre et de ne plus très bien savoir ce qui correspond à quoi.

Voici donc un court article qui présente ces différents espaces afin de vous aider à mieux choisir lequel pourrait vous être le plus utile.

groupe de supervision

Les Groupes Balint

Les groupes Balint sont des groupes de formation pour les médecins étendus par la suite aux soignants en général. Ils ont été créés dans l’immédiate après-guerre par M.Balint à la Tavistock Clinic de Londres.

Les groupes réunissent entre 8 et 12 soignants qui se retrouvent régulièrement (à l’origine toutes les semaines) afin de réfléchir à leur pratique clinique. Les échanges portent sur la présentation d’un cas clinique et sur la relation soignant-soigné. Les groupes sont animés par un ou deux psychanalystes qui veillent au respect de la parole de chacun, à l’absence de jugement et à la spontanéité des échanges.

Pour en savoir plus

Balint France : le site de la société française des groupes Balint.

Le groupe Balint, Une autre façon de penser le soin : Un article du Journal des Psychologues en libre accès qui présente l’origine et l’histoire de ces groupes.

Sur les traces de Balint

Ce film réalisé en 1977 par Eric Duvivier revient sur l’histoire et sur le fonctionnement des groupes Balint. Il s’appuie notamment sur le travail de Michel Sapir, auteur de La Formation psychologique du médecin.

Le documentaire a cela de fascinant qu’il permet de faire revivre toute une époque, une certaine manière de penser la clinique, les rapports humains, le déroulement de la pensée.

Je ne peux pas vous mettre directement la vidéo dans cette article mais elle est librement consultable sur le site de Canal-U (cliquer ici).

Groupes d’Analyse des Pratiques

Les groupes d’analyse des pratiques regroupent un grand nombre de pratiques dont les modalités ou les orientations théoriques peuvent varier mais dont les caractéristiques principales restent identiques.

Si l’on parle plus souvent de supervision dans le champ « psy », on utilisera plus souvent le terme d’analyse des pratiques dans le monde éducatif et social.

La galaxie des groupes d’analyse de la pratique en institution se déploie ainsi à travers différentes dénominations : analyse des pratiques professionnelles, supervision d’équipe, régulation d’équipe, groupe d’analyse des pratiques.

Il s’agit le plus souvent de groupes internes aux institutions, intégrant un intervenant extérieur (ce qui les différencie des synthèses, synthèses institutionnelles, etc.). Elles peuvent être centrées sur le travail clinique, le fonctionnement groupal, institutionnel, etc.

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Tentant de faire la synthèse de pratique diverses, le site « analyse des pratiques professionnelles » définit ainsi l’analyse des pratiques comme :

 

«  une intervention au sein d’un groupe d’accompagnants ayant pour finalité première une plus grande prise en compte des besoins de l’usager ainsi que la promotion de celui-ci et de ses projets à partir de l’observation et de la compréhension des situations éducatives et/ou pédagogiques concrètes vécues par les participants. Elle doit permettre de donner du sens et de la cohérence aux interventions tout en intégrant la diversité des acteurs et les différences de points de vue ».

Pour en savoir plus

Analyse des pratiques : Un site qui présente et propose de nombreuses formes d’analyse des pratiques.

Revue de l’analyse des pratiques : Le site de la revue de l’analyse des pratiques professionnelles. De nombreux articles sont librement consultables en ligne.

Présentation en vidéo

Pour en savoir plus n’hésitez pas à regarder cette vidéo très bien réalisée, qui exemplifie bien les enjeux et le fonctionnement d’un GAPP dans un hôpital.

Groupes d’intervision

L’intervision est un dispositif d’analyse de la pratique professionnelle, pratiqué notamment par les psychologues. Si l’on voulait en schématiser le fonctionnement, on pourrait dire qu’il s’agit d’un groupe de supervision sans superviseur.

De manière plus précise, pour la Fédération française de Psychologie Psychanalytique, l’intervision est :

« Un dispositif particulier de rencontre entre pairs fondée sur une réflexion collective sur les pratiques et les expériences professionnelles, dans un regard croisé et bienveillant. Il se réalise dans un cadre totalement confidentiel. »

L’absence de superviseur constitue la spécificité principale de ce type de groupe. Il s’organise ainsi sur un mode non hiérarchique, ce qui le distingue entre autres de l’évaluation et de l’auto-évaluation. L’intervision est également à différencier de la supervision, qui, elle, s’articule obligatoirement autour d’un superviseur qui en organise le fonctionnement. L’intervision aide les professionnels à se sentir soutenus par un collectif, à construire des ponts entre les différentes orientations théoriques et les différentes formes de pratiques.

D’un point de vue strictement pratique, ces groupes sont souvent peu onéreux, plutôt simples à mettre en place pour un groupe de professionnel existant, en particulier à l’ère des réseaux numériques. La difficulté tient souvent dans la capacité du groupe s’auto-gérer, à perdurer ou à approfondir des questions cliniques sans référent extérieur.

Pour en savoir plus

Pourquoi et comment créer un groupe d’intervision ? : un article du site « Psychogitation » qui détaille les enjeux et la mise en place d’un groupe d’intervision.

Forum FFPP : Le forum de la fédération française des psychologues et de psychologie recense régulièrement des propositions de création de groupe d’intervision.

Présentation en vidéo

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter cette vidéo au ton très juste et sincère qui explique comment mettre en place une intervision entre psychologues.

L’analyse de contrôle

L’analyse de contrôle est à l’origine des supervisions individuelles. Elle a été définie et mise en place dès les années 20 à partir notamment du travail de Max Eitingon. Sa définition et sa pratique sont très liées aux questions de formation des psychanalystes et à l’histoire des sociétés de psychanalyse. Comme l’écrit Le Bouscat dans Topique : « Si la crise ouverte au cœur de la psychanalyse est sa transmission, alors l’analyse de contrôle est son symptôme » (Topique, n° 103, Le Bouscat, L’Esprit du Temps, septembre 2008).

L’analyse de contrôle avait pour but de permettre aux futurs psychanalystes de mieux comprendre le fonctionnement de cette méthode en évoquant une analyse en cours auprès d’un analyste chevronnée. D’abord mise en place de manière informelle, cette pratique fut intégrée au parcours de formation de psychanalyste lors de la mise en place des sociétés de psychanalyse.

Plus didactique et « supervisante » que les supervisions actuelles, l’analyse de contrôle avait trois fonctions principales possibles selon Conrad Stein (C. Stein, « Sur la pratique des cures contrôlées » (1970), in La mort d’Œdipe, Paris, 1977):

  • Une pratique de surveillance du candidat et de sa pratique débutante

  • Une demande déguisée d’une nouvelle tranche d’analyse

  • L’enseignement d’une technique

Après la seconde guerre mondiale, de nombreux débats et conflits éclatèrent quant à la place que devait prendre ce « contrôle » dans la formation des analystes. Le risque était en effet que les différents rôles et les intérêts de chacun soient confondus. Pour le dire vite, l’analyste en formation risquait de ne pas se montrer suffisamment sincère lors de son analyse de contrôle puisqu’il avait intérêt à se montrer sous son meilleur jour.

A partir des années 1960, chaque école de psychanalyse a ainsi apporté à cette question des réponses différentes qu’il serait trop long de résumer ici (voir notamment cet article de Jacques Sédat pour en savoir plus).

Aujourd’hui de nombreuses sociétés de psychanalyse préfèrent ainsi parler de supervisions plutôt que d’analyse de contrôle afin de se démarquer de la dimension de surveillance que peut évoquer le terme de contrôle.

Pour en savoir plus

Roger Perron, « Contrôle (psychanalyse sous-) », dans Alain de Mijolla (dir.), Dictionnaire international de la psychanalyse 1. Paris, .

Vivès, Jean-Michel. « L’analyse de contrôle : une façon de ne pas oublier », Topique, vol. 112, no. 3, 2010, pp. 27-36.

Levaque, Cédric. « L’analyse de contrôle », Cahiers de psychologie clinique, vol. 56, no. 1, 2021, pp. 87-100.

La supervision

La supervision est un dispositif de formation professionnalisant dans lequel « une personne en situation de responsabilité vise à améliorer la qualité de l’acte professionnel des personnes dont elle est responsable » (Dana Castro).

L’origine de la supervision « est confondue avec la naissance même de la psychanalyse » (L. Michel, Y. de Roten). Sa pratique se détache de celle des analyses de contrôle et se diversifie à partir des années 1960. Elle se distingue ainsi par la recherche d’une plus grande horizontalité, l’éloignement du contrôle institutionnel et une diversification de ses pratiques.

Si, depuis cinquante ans, chaque grand école théorique (tcc, systémie, gestalt…) apporte sa propre vision de la pratique de la supervision, la plupart des superviseurs travaillent avec des supervisés appartenant à différents courants théoriques.

On distingue aujourd’hui trois grandes formes de supervision:

-La supervision individuelle : dans laquelle un superviseur va aider un supervisé à réfléchir à sa pratique à travers notamment l’analyse du contre-transfert, l’étude de cas ou des réflexions plus théoriques.

-La supervision de groupe : dans laquelle l’élaboration se fait au sein d’un groupe de professionnels ou d’étudiants, que ce soit en libéral, au sein d’une école de formation ou de l’université.

-La supervision d’équipe : qui se pratique au sein des institutions et dont la pratique se rapproche alors fortement des groupes d’analyse des pratiques.

Ces différentes formes de supervisions sont complémentaires, chacune venant offrir un cadre de réflexion spécifique sur le travail clinique.

Pour en savoir plus

Delourme A., Marc E. et al., La supervision en psychanalyse et en psychothérapie, Dunod, 2011.

Devienne, E., Le grand livre de la supervision, Eyrolles, 2010.

Michel, L., de Roten, Y., « Les mystères de la supervision à l’aune de la recherche », Psychothérapies, 2009/4 (Vol. 29), pp. 225-232.

Voir également mon article sur l’histoire des supervisions

vincent Joly
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Résumé
Supervision, intervision, groupe d'analyse des pratiques,  : quelles différences ?
Nom de l’article
Supervision, intervision, groupe d'analyse des pratiques, : quelles différences ?
Description
Il existe différentes formes d’outils de formation professionnelle et de retour sur son travail et son vécu dans les champs psychologiques, médico-sociaux et médicaux : supervision individuelle, de groupe, groupe d’intervision, groupe d’analyse des pratiques… On risque vite de s’y perdre et de ne plus très bien savoir ce qui correspond à quoi. Je vais donc essayer de présenter et de définir ces différents espaces afin de vous aider à mieux choisir lequel pourrait vous être le plus utile.
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