Surmenage

Dans les media, on parle beaucoup de surmenage depuis quelques années. Dans certaines professions, il peut même être valorisé socialement de se dire « surmené ». Pourtant, le surmenage et la sensation d’épuisement qui l’accompagne doivent être pris au sérieux.

Comme nous allons le voir dans cet article, le surmenage est un symptôme, une alerte. On peut le comparer à un voyant du tableau de bord d’une voiture qui se mettrait à clignoter. Même si on peut toujours continuer à rouler avec un voyant étrange qui clignote, il est toujours préférable de s’en préoccuper.

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Qu’est-ce que le surmenage ?

Le surmenage est une asthénie, c’est-à-dire un affaiblissement de l’organisme, qui s’accompagne d’un sentiment d’épuisement physique et/ou psychique.

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Surmenage et fatigue

Le surmenage doit être distingué de la fatigue occasionnelle :

La fatigue est la conséquence ponctuelle et normale d’un effort intense, qu’il soit physique ou intellectuel. Après la fatigue, l’organisme peut retrouver son équilibre antérieur.

A l’inverse, le surmenage désigne un excès qui produit un sentiment d’usure, d’épuisement.

On distingue habituellement les surmenages aigus, ponctuels et de ceux dits chroniques, installés dans la durée.

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Signes et symptômes

Le surmenage se caractérise par des troubles du sommeil, des symptômes somatiques et psychologiques :

      • Douleurs physiques (dorsales, articulaires, musculaires…)
      • Troubles digestifs, pouvant parfois entraîner des ulcères d’estomac, des pertes ou des gains de poids
      • Problèmes cutanés
      • Infections bénignes à répétition (rhumes, otites, sinusites…)
      • Maux de tête ou migraines

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D’une manière générale, plus les symptômes sont persistants, plus il est important de s’en préoccuper. Le principal risque est de ne pas voir le sens des symptômes. Ainsi, je reçois souvent des patients qui n’ont pas pu écouter leur corps ni leur souffrance ou leur inquiétude. Ils ne s’autorisent à consulter qu’une fois que la souffrance physique ou psychologique ne leur permet plus d’avancer.

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Les conséquences du surmenage

On peut percevoir deux principaux risques face au surmenage :

  1. La blessure physique ou la somatisation importante

  2. La dépression

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  1. La blessure physique

Du point de vue de l’organisme, les symptômes liés au surmenage, s’ils ne sont pas entendus, augmentent le risque de blessure, d’accident ou de tomber malade.

C’est, par exemple ce que l’on observe dans les sports de haut niveau où l’on constate une forte augmentation des blessures physiques lorsque les sportifs enchaînent des efforts physiques intenses sans pouvoir se reposer suffisamment entre-temps.

Ce qui vaut pour le sport vaut également pour le monde professionnel en général ou même pour des rythmes de vie effrénés. Dans ces deux derniers cas l’épuisement sera plus souvent d’ordre psychologique ou émotionnel mais les conséquences pourront être tout aussi importantes.

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  1. La dépression

Le surmenage peut parfois déboucher sur une dépression. En effet, face à l’ampleur des tâches à accomplir, et si l’on n’écoute pas sa fatigue, on risque de finir par se sentir submergé et mis en échec. La frustration et le sentiment d’être piégé par une existence où, comme dans Alice au pays des merveilles, il faut courir pour rester à la même place, peuvent avoir un effet négatif important sur l’estime de soi. Des patients me racontent ainsi comment ils ont eu l’impression de « tenir » jusqu’à ce que la machine s’enraye et qu’ils n’aient plus le goût ni l’énergie de rien.

Dans certaines situations le surmenage peut également fonctionner comme une fuite face à des émotions douloureuses.

La surcharge de travail, l’épuisement dans une vie trépidante permettent de ne pas penser à des évènements douloureux (séparation, deuil, échecs personnels, etc.) ou à fuir une image de soi négative.

Dans ces cas, il est particulièrement difficile de diminuer la cadence car la peur d’être rattrapé par sa tristesse ou son angoisse est très grande. Un travail thérapeutique aura alors pour but de créer peu à peu un espace suffisamment contenant pour que la tristesse puisse se dire sans être vécue comme un déferlement traumatique.

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Pour en savoir plus sur le surmenage

 

-Surmenage et charge mentale, Christophe André

Dans sa chronique du 10 Avril 2018 sur France Inter, le psychiatre Christophe André revient sur la notion de charge mentale qui a beaucoup à voir avec le surmenage.

Comme il l’explique: « la charge mentale, c’est savoir, au fond de nous, que nous n’aurons jamais assez de temps pour toutes les faire, ces choses, ou du moins pour toutes les faire tranquillement, calmement, comme il faudrait. Il va falloir accélérer, il va falloir speeder, il va falloir, surtout, ne pas se reposer, ne pas perdre de temps… C’est là que les ennuis commencent »

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– Surmenage et stress à travers l’histoire, Georges Vigarello

Pour prendre un recul historique sur la notion de surmenage, voici également une émission de France Culture sur le surmenage et le stress à travers l’histoire.

L’invité de cet épisode de Concordance des temps est l’historien Georges Vigarello, spécialiste de l’histoire de la santé. Il évoque la façon dont la fatigue physique et mentale a pu être, de siècle en siècle, éprouvée, ressentie, combattue ou maîtrisée.

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Sources et bibliographie:

  • Forest, Denis. « Fatigue et normativité », Revue philosophique de la France et de l’étranger, vol. tome 126, no. 1, 2001, pp. 3-25.
  • Jacob, Georges, et Madeleine Natanson. « La fatigue au travail, la fatigue du travail », Imaginaire & Inconscient, vol. 25, no. 1, 2010, pp. 167-186.
  • Loriol, Marc. « Donner un sens à la plainte de fatigue au travail », L’Année sociologique, vol. vol. 53, no. 2, 2003, pp. 459-485.
  • Truchot, Didier. « Workaholisme ou l’ergomanie », Gérard Valléry éd., Psychologie du Travail et des Organisations. 110 notions clés. Dunod, 2016, pp. 445-447.
  • Veil, Claude. « Les états d’épuisement », , Vulnérabilités au travail. Naissance et actualité de la psychopathologie du travail, sous la direction de Veil Claude. ERES, 2012, pp. 175-186.

vincent Joly
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